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Actualité
3/12/25

Quand le son s’arrête mais que le nom continue : l’affaire Bang & Olufsen et la contrefaçon post-contractuelle

La décision rendue le 13 novembre 2025 par le Tribunal judiciaire de Paris apporte une illustration particulièrement nette d’une situation fréquente dans les réseaux de distribution sélective : celle d’un distributeur agréé qui, une fois le contrat résilié, continue à utiliser les marques de son ancien fournisseur comme si la relation commerciale n’avait jamais pris fin. L’affaire Bang & Olufsen montre avec précision comment une exploitation auparavant autorisée peut, après la rupture du contrat, dégénérer en contrefaçon par reproduction, alors même qu’aucun produit contrefaisant n’est en cause.

I. Le glissement d’une exploitation autorisée vers un usage non autorisé après la fin du contrat

La société danoise Bang & Olufsen A/S, titulaire des célèbres marques BANG & OLUFSEN, B & O et de son monogramme figuratif, opère un réseau sélectif pour la distribution de ses équipements audiovisuels. En 2014, une société française de vente d’appareils hi-fi intègre ce réseau en qualité de détaillant agréé, à la suite d’un contrat conclu le 6 novembre 2014 avec Bang & Olufsen France. Cette convention lui permettait d’utiliser les marques dans sa communication commerciale et dans un magasin dédié.

Cependant, le contrat prévoyait très clairement, notamment dans son article 16, qu’en cas de fin de relation, le distributeur devait immédiatement cesser tout usage des marques, retirer toute communication référant au nom Bang & Olufsen et modifier sa dénomination sociale si elle comportait les signes « B&O » ou « Bang & Olufsen ». La relation contractuelle a pris fin le 31 mai 2020, mettant également fin à toute autorisation d’usage.

C’est sur ce point que le litige naît : plusieurs années après la résiliation, Bang & Olufsen constate que la société continue à utiliser, dans la vie des affaires, les signes « Espace Bang & Olufsen », « Espace B&O », ainsi que le logo figuratif protégé, via des bons de commande, documents d’affaires, fiches professionnelles, extraits Kbis et même les supports numériques du dirigeant. Cette situation, auparavant licite, devient immédiatement illicite dès la rupture du contrat.

Malgré des mises en demeure successives (2022 à 2024), aucune régularisation n’est intervenue. La situation se complique encore par l’ouverture, en 2025, d’une liquidation judiciaire, qui conduit Bang & Olufsen à assigner le liquidateur en intervention forcée dans le cadre d’une procédure de référé.

2. Une contrefaçon caractérisée par l’usage non autorisé de signes identiques à des marques de l’Union européenne

Le juge des référés rappelle que, conformément à l’article L.716-4-6 du Code de la propriété intellectuelle, il peut ordonner toute mesure propre à prévenir une atteinte vraisemblable à une marque. Il se réfère également à l’article 9 du Règlement (UE) 2017/1001, qui régit la portée de la protection conférée par la marque de l’Union.

L’analyse des pièces démontre que les signes « Espace Bang & Olufsen » et « Espace B&O » constituent, pour le public pertinent, une reproduction quasi identique des marques enregistrées. Le terme « Espace » est jugé descriptif et dépourvu d’impact distinctif, tandis que le remplacement de « & » par « et » ne modifie en rien l’impression d’ensemble. L’usage du monogramme figuratif identique à la marque n° 000781666 renforce encore la similitude.

Le point décisif est que cet usage, autrefois autorisé, est devenu totalement dépourvu de base légale depuis 2020. La persistance de ces références, pour désigner des produits identiques à ceux protégés en classe 9, constitue dès lors une contrefaçon vraisemblable par reproduction, sans nécessité d’examiner les griefs subsidiaires de concurrence déloyale.

3. Les mesures ordonnées : une injonction ferme au respect des obligations post-contractuelles

Compte tenu du caractère vraisemblable de la contrefaçon, le Tribunal judiciaire de Paris ordonne une cessation complète de l’usage des signes litigieux. L’ancien détaillant, représenté par son liquidateur, se voit interdire d’utiliser les dénominations incriminées dans sa communication, sa documentation commerciale, ses supports marketing ou sa dénomination sociale.

Le tribunal interdit également la cession d’éléments ou matériels comportant les marques à un éventuel repreneur, afin d’éviter une poursuite indirecte de l’usage illicite.

Signe fort, le juge impose une modification de la dénomination sociale, mesure rare mais parfaitement justifiée pour éviter qu’un futur acquéreur ne profite d’une association indue à la marque Bang & Olufsen.

Les dépens sont laissés au passif de la procédure collective.

Conclusion

Cette affaire rappelle un principe central : l’autorisation d’usage d’une marque prend fin strictement avec le contrat qui la fonde. Toute utilisation postérieure, même identique à celle auparavant permise, devient une contrefaçon.

Les titulaires de marques ont donc tout intérêt à surveiller étroitement l’usage post-contractuel fait par leurs anciens distributeurs et, si nécessaire, à saisir le juge des référés.

Vincent FAUCHOUX
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