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3/2/17

Affaire GALEC : La Cour de Cassation rend un important arrêt en matière de déséquilibre significatif

La Cour de cassation vient de rendre, le 25 janvier dernier[1], son arrêt dans l’affaire opposant le Ministre de l’économie au GALEC, par lequel elle rejette le pourvoi du GALEC à l’encontre de l’arrêt de la Cour d’appel de Paris du 1er juillet 2015[2].

Pour rappel, cet arrêt a condamné le GALEC, à la suite d’une action introduite par le Ministre de l’économie, à restituer à 48 fournisseurs plus de 61 millions d’euros. La Cour a en effet jugé que la ristourne de fin d’année (RFA) GALEC insérée dans 118 conventions annuelles 2009 et 2010 constituait un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties dans la mesure où les fournisseurs concernés ont versé une RFA GALEC alors que le distributeur n’a pris aucune obligation ou aucune obligation réelle à leur égard. Les cas suivants avaient été relevés :

  • 9 conventions ne subordonnaient le versement de la RFA GALEC à aucune obligation à la charge du GALEC ;
  • 23 conventions ne précisaient pas l’obligation mise à la charge du GALEC ;
  • 29 conventions ne précisaient pas le montant du chiffre d’affaires annuel minimum justifiant le versement de la RFA ;
  • 57 conventions fixaient le montant du chiffre d’affaires annuel minimum à un montant inférieur de près de la moitié à celui réalisé l’année précédente et l’année durant laquelle la RFA était due, en justifiant le montant retenu par l’existence d’une incertitude économique inexistante au moment de la conclusion du contrat.

La Cour avait également sanctionné le fait que les acomptes sur RFA versés par les fournisseurs étaient calculés sur un chiffre d’affaires prévisionnel proche de celui réalisé et surtout très supérieur au montant du chiffre d’affaires sur lequel le GALEC s’était engagé auprès des fournisseurs pour obtenir la RFA.

Le GALEC avait formé un pourvoi à l’encontre de cette décision dont la Cour de cassation vient donc de confirmer l’analyse dans un arrêt – publié au Bulletin – qui marquera sans nul doute les négociations commerciales à venir, en ce qu’il apporte les précisions et enseignements ci-après :

Le prix peut faire l’objet d’un contrôle judiciaire sur le fondement de l’article L. 442-6-I-2° du Code de commerce :

L’une des questions essentielles auxquelles la Haute juridiction devait apporter une réponse était de savoir si le juge peut procéder à un contrôle judiciaire du prix et de ses composantes dont les réductions de prix, par application de l’article L. 442-6-I-2° du Code de commerce qui prohibe, depuis la loi LME, le déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties.

Sur ce point, la Cour d’appel de Paris avait jugé que « si le juge judiciaire ne peut contrôler les prix qui relèvent de la négociation commerciale, il doit sanctionner les pratiques commerciales restrictives de concurrence et peut annuler les clauses contractuelles qui créent un déséquilibre significatif […], même lorsque ces clauses sont relatives à la détermination du prix, et ce en application des dispositions de l’article L. 442-6 I 2° du code de commerce […] ».

La Cour de cassation confirme l’analyse de la Cour d’appel en consacrant, très clairement, la possibilité pour le juge d’exercer un contrôle judiciaire sur le prix dès lors que ce dernier caractérise un déséquilibre significatif.

La Cour précise tout d’abord que dans les rapports entre un fournisseur et un distributeur, le déséquilibre significatif s’apprécie au regard de la convention écrite prévue par l’article L. 441-7 du Code de commerce, laquelle précise les obligations auxquelles se sont engagées les parties et fixe, notamment, les conditions de l’opération de vente, comprenant les réductions de prix, telles qu’elles résultent de la négociation commerciale. La Cour en conclut « qu’ayant constaté que l’annexe 2 des contrats-cadres stipulait que la ristourne litigieuse était prévue au titre des conditions de l’opération de vente, la cour d’appel en a justement déduit que les clauses litigieuses relevaient de l’article L. 442-6, I, 2° du même code »

La Cour précise ensuite que, même si les notions de déséquilibre significatif prévues par le Code de commerce et le Code de la consommation[3] présentent une similitude relevée par le Conseil constitutionnel dans sa décision du 13 janvier 2011[4], il n’en demeure pas moins qu’il peut exister « entre elles des différences de régime tenant aux objectifs poursuivis par le législateur dans chacun de ces domaines, en particulier quant à la catégorie des personnes qu’il a entendu protéger et à la nature des contrats concernés ». Cette précision étant faite, la Haute juridiction ajoute que :

« ainsi, l’article L. 442-6, I, 2° précité […] n’exclut pas, contrairement à l’article L. 212-1 du code de la consommation, que le déséquilibre significatif puisse résulter d’une inadéquation du prix au bien vendu ; […] que la loi du 4 août 2008, en exigeant une convention écrite qui indique le barème de prix tel qu’il a été préalablement communiqué par le fournisseur, avec ses conditions générales de vente, a entendu permettre une comparaison entre le prix arrêté par les parties et le tarif initialement proposé par le fournisseur ; qu’il suit de là que l’article L. 442-6, I, 2° du code de commerce autorise un contrôle judiciaire du prix, dès lors que celui-ci ne résulte pas d’une libre négociation et caractérise un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties« .

Les conditions particulières de vente doivent avoir une contrepartie ou une justification :

La Cour de cassation confirme à nouveau l’analyse de la Cour d’appel de Paris qui avait jugé que : « si la loi LME a instauré le principe de libre négociabilité des conditions de vente et fait des CPV le siège de la négociation commerciale, la loi n’a pas supprimé la nécessité de contrepartie ou de justification aux obligations prises par les cocontractants, même lorsque ces obligations ne rentrent pas dans la catégorie des services de coopération commerciale » et que « la réduction de prix accordée par le fournisseur doit avoir pour cause l’obligation prise par le distributeur à l’égard du fournisseur ». Ce faisant, les juges d’appel avaient écarté l’un des arguments du GALEC qui soutenait que la loi LME avait fait disparaître toute contrepartie ou justification aux conditions particulières de vente (CPV).

La Haute juridiction souligne ainsi que « la cour d’appel a déduit à bon droit que le principe de la libre négociabilité n’est pas sans limite et que l’absence de contrepartie ou de justification aux obligations prises par les cocontractants, même lorsque ces obligations n’entrent pas dans la catégorie des services de coopération commerciale, peut être sanctionnée au titre de l’article L. 442-6, I, 2° du code de commerce ».

La Cour de cassation réaffirme ses critères d’appréciation du déséquilibre significatif :

La Cour de cassation a rendu, à compter de 2015, plusieurs décisions importantes contribuant à fournir des lignes directrices pour apprécier l’existence du déséquilibre significatif de l’article L. 442-6-I-2°.

Parmi les critères mis en avant pour caractériser l’infraction, la Cour de cassation a précisé, notamment dans ses décisions dites Eurauchan[5] et Provera[6] du 3 mars 2015  que :

  • Une clause d’un contrat qui serait déséquilibrée individuellement peut être contrebalancée par d’autres clauses qui viendraient rééquilibrer le contrat et corriger ce déséquilibre, étant précisé que la charge de la preuve de ce rééquilibrage pèse sur celui qui est poursuivi.
  • L’absence de négociation constitue un indice du déséquilibre significatif : « Les contrats étaient exécutés sans qu’il soit donné suite aux réserves ou propositions d’avenants, de sorte qu’ils constituaient de véritables contrats d’adhésion ne donnant lieu à aucune négociation effective des clauses litigieuses ». « Aucune suite n’était donnée aux réserves ou avenants proposés par les fournisseurs pour les modifier ».

Ces critères sont repris dans la présente affaire. Ainsi, est-il souligné que « le GALEC n’allègue pas que d’autres stipulations contractuelles permettraient de rééquilibrer la convention » ou encore que la cour d’appel a caractérisé la soumission requise par le texte de l’article L. 442-6 en constatant que les clauses relatives à la RFA GALEC, pré-rédigées par ce dernier, constituaient « une preuve intangible de tous les contrats examinés et n’avaient pu faire l’objet d’aucune négociation effective ».

Cette décision, très attendue des opérateurs économiques, aura des répercussions sur les relations industrie-commerce, tout particulièrement sur les négociations commerciales en cours et à venir.

Julie ZOUGHI

[1] Cf. Cass. Com., 25 janvier 2017, n°15-23547.

[2] Cf. CA Paris, 1er juillet 2015, n°13/19251.

[3] Cf. art. L. 212-1 (ancien art. L. 132-1).

[4] Déc. Cons. Const. n°2010-85 QPC du 13 janvier 2011.

[5] Cass. Com., 3 mars 2015, n°13-27525.

[6] Cass. Com., 3 mars 2015, n°14-10907.

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