


Le 13 septembre 2025, le Conseil consultatif conjoint de déontologie de la relation magistrats-avocats a publié un texte important relatif à l’usage de l’intelligence artificielle générative (IAG) dans l’exercice professionnel des magistrats et des avocats1. Ce document propose un cadre de référence commun visant à encadrer l’utilisation de ces outils par les acteurs du procès, en conciliant les possibilités offertes par l’IAG avec les exigences fondamentales du débat judiciaire et du secret professionnel.
Ce texte rappelle d’abord que l’intelligence artificielle générative peut constituer un appui méthodologique utile, notamment pour accélérer la recherche documentaire, faciliter la synthèse de dossiers volumineux ou assister la rédaction de projets d’actes. Employée comme outil d’assistance, l’IAG peut ainsi contribuer à améliorer l’efficacité du travail juridique, à condition de rester strictement subordonnée au raisonnement humain.
Cependant, le document insiste également sur les limites et les risques d’un usage non maîtrisé. L’IAG ne saurait en aucun cas se substituer à l’analyse du magistrat ou de l’avocat, qui demeure seul responsable du contenu qu’il produit ou valide. Les modèles d’IA peuvent en effet reproduire des biais issus des données sur lesquelles ils ont été entraînés et générer des références inexactes ou trompeuses, appelées « hallucinations ». L’usage non critique de l’IA peut ainsi conduire à des erreurs d’appréciation ou de qualification.
Le texte souligne en outre la nécessité de préserver le secret professionnel. Aucune donnée confidentielle, notamment issue de dossiers en cours, ne doit être versée dans un outil d’intelligence artificielle dont la sécurité, la souveraineté et la maîtrise de l’hébergement ne sont pas garanties. L’introduction de telles données dans des plateformes ouvertes ou non européennes contreviendrait aux obligations professionnelles les plus essentielles.
Enfin, le Conseil consultatif rappelle que l’utilisation de l’IAG doit demeurer explicable. L’avocat ou le magistrat doit être en mesure de justifier la solution qu’il adopte, indépendamment de l’outil. L’intelligence artificielle ne « raisonne » pas au sens juridique du terme : elle propose. La décision, elle, appartient exclusivement à l’humain.
Ainsi, le texte appelle à une pratique raisonnée, maîtrisée et critique : l’IAG assiste, elle ne décide pas.
Elle suit l’analyse, elle ne la précède pas.
1 Conseil consultatif conjoint de déontologie de la relation magistrats-avocats, « Usage de l’intelligence artificielle générative dans la pratique judiciaire », 13 septembre 2025

